ménage de printemps

J'ai dormi pour la première fois, hier soir, dans la chambre de ma fille. Elle est vidée d'à peu près tout, ne reste que le lit, une chaise, un tabouret et un miroir. Et aussi une espèce de bibliothèque métallique chancelante de chez IKEA que j'aime bien parce qu'elle se déplace facilement et peut contenir des éléments de décoration sans qu'elle ne soit trop visible et le sèche-linge, refermé et appuyé sur un mur. J'ai l'habitude, depuis quelques années, pour toutes sortes de raison liées à l'insomnie, de dormir dans un fauteuil. Il me semble que de cette façon, je berne cette satanée insomnie en faisant presque semblant de n'aller faire qu'une petite sieste, tout bonnement, et ainsi, sans qu'il ne se soit rien passé d'extraordinaire, imperceptiblement, j'arrive à dormir du sommeil du juste jusqu'au lendemain matin. De nuit en nuit, j'en ai pris l'habitude, et un jour j'ai refilé mon lit à la petite, et maintenant qu'elle est partie, j'ai pris mon courage à deux mains, me suis réappropriée le lit et m'y suis couchée. Le matelas est un peu trop mou à mon goût mais j'ai réussi à dormir. Il me semble que je me sentais plus en sécurité dans mon bon vieux fauteuil (dont la housse a passé à la machine ce matin et sèche maintenant dehors au soleil), avec l'impossibilité de changer de posture, l'appui réconfortant du dos, et la position recroquevillée de mise (pas de possibilité de m'allonger complètement); dans le lit ouvert à tous vents, je n'ai pas d'appui, je me retrouve vulnérable, sans support et sans cette espèce de gaine protectrice, apaisante, avec la sensation d'enveloppement que me procurait l'exiguïté du fauteuil, cet écrin rassurant. Je ne peux pas croire que je ne serai pas capable de dormir normalement comme tout le monde dans un lit normal (mais ça pourrait arriver). Peut-être une jolie méridienne réglerait la question.

Sinon c'est la petite vie, lecture, écriture, courses, ménage. Beaucoup de ménage, comme si après le départ de ma petite il fallait que je remette le compteur à zéro et que je recommence à neuf, comme dans un nouvel appartement qu'on investit et qu'on nettoie à fond des miasmes et autres traces douteuses des occupants précédents. Je me sens un peu désorientée, perdue dans mon "nouvel environnement", et en nettoyant à fond je me réapproprie l'espace, cet espace dans lequel je me meus, sans trop croire que je suis définitivement seule ici, qu'il se pourrait que pour le reste de ma vie personne ne m'attende jamais plus pour le souper, et d'une certaine façon, c'est tant mieux. Même si parfois ça me fait peur tout cet espace et toute cette liberté et tout ce temps qui reste à emmagasiner des expériences pour qui, pour quoi.

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