Dieu

Toute mon enfance, je suis allée à l'église avec mon père. Ce n'était pas agréable. Je n'y comprenais rien et considérait cela comme une corvée, comme le ménage du samedi matin à la maison, comme toutes les autres choses plates auxquelles j'étais astreinte. Lorsque j'ai fait mes premiers meetings d'Alcooliques Anonymes en 2003, il y avait cette idée de Dieu qui vraisemblablement semblait jouer un rôle important dans cette organisation. Je n'étais pas préparée à ça et imperméable à toute forme de spiritualité. Cela m'a agacée cette idée de Dieu, comme quelque chose d'inconvenant ou de suprêmement hors sujet. Je n'ai jamais pensé à Dieu comme un source potentielle de remède ou de réconfort ou d'abri ou de rien du tout. Dieu n'a jamais eu de réalité pour moi, même si je me suis mariée à l'église et fait baptiser ma fille et passé tous mes dimanches matins à l'église étant jeune.

Au cours des années qui ont suivi mon arrivée dans AA et mon abstinence de drogue et d'alcool, j'ai été ni plus ni moins obligée de me pencher sur la question de Dieu dans ma vie. En fait, je n'ai pas senti que je pouvais garder ma sobriété à moins d'un certain abandon (ou d'un abandon certain) concernant cette question. Abandon de mes vieilles idées, ou plutôt abandon de mon indifférence à la question. C'était une question de survie. Donc, j'ai fait ce qu'on m'a recommandé de faire dans ces situations: "faire comme si". "Faire comme si", c'est se mettre dans une disposition d'ouverture d'esprit et demander à Dieu, tel que je le conçois, de faire pour moi ce que je ne peux pas faire par moi-même (même de croire en Dieu). C'est se mettre en 2e plan, après Dieu. C'est d'accepter de croire qu'il se pourrait que je n'aie pas toutes les réponses. C'est d'accepter d'envisager la vie d'une façon différente.

J'ai bien senti au cours du temps dans AA que les gens les plus heureux et les plus épanouis étaient ceux qui pratiquaient le programme des 12 Étapes et remettaient leur vie et leur volonté à Dieu comme le programme le suggère. J'avais sous les yeux des exemples parfaits de gens qui avaient réussi à complètement changer le cours de leur vie en s'abandonnant au programme, qui est un mode de vie spirituel. Ce sont ces témoignages en temps réel, jours après jours, de ces gens habités qui m'ont le plus fait réaliser l'inanité d'une conception de la vie basée sur du vide et sur du rien. L'absence de toute forme de croyance a eu, chez moi, des conséquences autrement plus dramatiques que celle de m'abandonner au simple programme des AA. Tant que je ne m'abandonnerais pas à une puissance supérieure que j'appelle Dieu, ma vie pouvait sérieusement rester en friche, et être un désert. Il fallait que je fasse quelque chose, que je passe à l'action genre. Mon abandon à Dieu n'est pas total. J'ai des rechutes, disons, de foi.

Je suis dans une drôle de période de ma vie en ce moment. Je pense que je suis en deuil d'un paquet de choses. De ma fille, d'être une mère à temps plein, de ma jeunesse, de ma beauté. Des hommes aussi. D'une sexualité. C'est dur. Ça prend du courage, parfois, juste vivre sa vie. Je demande, là, maintenant, à Dieu de vivre ma vie dignement et courageusement et ne pas lâcher (ne pas sombrer dans l'apitoiement).

J'ai fait un meeting hier, et un autre aujourd'hui. Demain aussi. Par chance j'ai ça.

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