le vide absolu créé par la surabondance
Binge watching hier pour "The night of", fabuleuse série américaine HBO de 8 épisodes qui m'a complètement captivée. C'est l'histoire d'un gars, Nazir Khan, qui se fait arrêter et inculper pour le meurtre d'une jeune femme qu'il aurait rencontrée et dont il ne se souvient pas du déroulement de la nuit passée avec elle et qui s'est soldée par son assassinat. On suit le parcours de tous les intervenants liés à cette affaire, jusqu'au verdict final....(ou l'absence de verdict).
Tout est bon dans cette série. Tout est parfait. Le rythme lent. L'intelligence du scénario. L'authenticité des personnages. Chaque protagoniste (policiers, procureurs, juge, prisonniers, membres de la famille, amis, etc.), pris dans son individualité, filmé sans effet ostentatoire et jamais forcé ni caricatural. Rien de trop ou d'inutile. Extrêmement troublant dans son inéluctabilité. Par petites touches, un monde nous est présenté et ce qu'on voit et ressent percute nos viscères et nos âmes.
Je ne me sens paradoxalement ni enchantée ni heureuse d'avoir accès à du si bon stock. Au contraire. C'est tellement bon et bien présenté et captivant que le reste (la vraie vie comme on dit) parait fade et sans intérêt. Comme par exemple aller faire des courses dans les vraies rues sales de Montréal, avec son vrai monde moche qu'on croise une fois et c'est déjà trop, tous ces gens au destin auquel on ne comprend rien et pour lequel on n'a pas accès. Et les yeux des gens sur soi, ou l'absence d'yeux sur soi. L'absence ou la présence des autres, l'altérité dans toute sa violence et ses mystifications. Le trop peu ou le trop plein. La recherche d'équilibre constante, impossible à trouver vraiment, tellement précaire. La vie à vivre. Ou à ne pas vivre. Mais qui passe quand même. Comme mes vacances qui passent sans qu'il ne se passe rien. Et cette volonté de ne rien faire surgir, que du connu, que du déjà-vu et vécu, pour prendre un break de "la vraie vie", celle du dehors, celle des choses qui nous sont imposées à longueur d'année.
Le visionnement de séries sont des moments bénis où il ne se passe rien. Rien de tangible. C'est comme un forme de masturbation, avec plénitude assurée mais sans chair autour de l'os. Quand c'est fini, c'est fini, on n'y pense plus. On passe à autre chose. Ce n'est pas de l'expérience vécue, que du loisir, pour faire passer du bon temps, et ce même si la série proprement dite est intelligente et élèverait supposément l'âme. Ça reste du loisir. Il n'y a pas de créativité là-dedans, pas d'effort à faire. C'est du tout-cuit, comme le manger mou pour les vieux. Ça laisse rien. Que le sentiment de vide absolu qui m'étreint trop souvent. Même si ce que j'ai vu et "expérimenté" était exceptionnel.
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