le sentiment de ma dignité est intrinsèquement lié à mes performances professionnelles

À chaque fois que je pense au bureau, le coeur me saute et bat trop fort. Toutes les choses qu'il ne faut pas faire pour en arriver là je les ai faites. C'est sûr, il y a un environnement, des circonstances, mais fondamentalement, je suis responsable de mon état. Je ne suis pas responsable, en tout état de cause, de l'état du bureau. J'essaie de maintenir les choses à flot. C'est extrêmement difficile. Ça prend des nerfs d'acier et un moral tout aussi solide ainsi qu'une capacité d'adaptation hors pair. Je sais très bien que je ne dois pas me rendre malade avec tout ça, que je dois me méfier de ma dureté naturelle envers moi-même, car cela me rend davantage anxieuse, prête à tout pour faire mieux, pour produire, pour performer. Il y a comme un conflit entre mon besoin de me prouver à moi-même que je peux surmonter les défis, et le sentiment que ce qui m'est imposé est injuste et insurmontable. Je ne veux pas être le jouet des circonstances et mettre ma santé en péril, mais d'une autre façon j'ai besoin de réussir, pour moi-même, ma fierté, ma dignité, mon amour-propre. 

Le départ de ma collègue me fragilise. Je ressens encore de l'amertume par rapport à cela, et, comme un capitaine seul à bord, sans équipage pour se frayer une voie à travers les flots, je navigue dans l'épouvante de perdre le cap, d'être submergée par les flots violents et me noyer. Et rien ne sera plus comme avant. Je crois être en deuil de cela, aussi. Gérer ma désolation me prend de l'énergie, et j'ai besoin de toute mon énergie. Je sens que je n'ai pas beaucoup de force vitale, la force qui tient en vie, qui ramène à la vie, qui fait couler la vie en soi. J'ai beaucoup changé, c'est peu de le dire, mais j'ai des faiblesses, des petits maillons très faibles en moi. J'essaie d'exercer davantage d'indulgence envers moi-même, sans tomber dans l'apitoiement ou la prostration. Cependant, mon besoin d'être utile, performante, aimée, respectée, admirée, et d'obéir, d'être loyale, fidèle, soumise, peut être une source ou plutôt déclencher de grandes angoisses de perfection. Le pire pour moi, c'est qu'on soit déçu, navré par mes performances, ou qu'on se trompe sur mes intentions et mon abnégation, ou qu'on les trouve nulles et non avenues (...).

Le danger, c'est que mon travail me ramène de façon excessive aux fondements de ma personne, et qu'il peut tout me donner ou tout m'enlever. Si les racines de ma personnalité sont liées à mes performances professionnelles, je suis mal barrée lorsque le contexte de travail ne me permet plus de me sentir valorisée, utile, excellente, performante. C'est ce qui arrive en ce moment (...).

Pour sortir de cela, il serait bon que je trouve autre chose par laquelle je pourrais me sentir utile, et faire éclater les multiples facettes de me personnalité. Donner de ma personne. Me donner comme je suis, avec mes forces, mes failles et mes faiblesses. Me donner un projet enthousiasmant et nourrissant qui me permettrait de mettre davantage en retrait ces désirs de performance et le sentiment d'une catastrophe imminente (burn-out). 

Le problème, c'est que mon énergie vitale est siphonnée par le bureau, et qu'il n'y a que 24 heures par jour n'est-ce pas. Le soir, je suis comme une chandelle qui s'éteint tranquillement, il n'y a rien à tirer de moi passé 7 heures. Et maintenant, je prends ces foutues pilules pour dormir qui me rendent abrutie le lendemain, un peu sonnée, étourdie, difficilement capable de me concentrer avant l'heure du dîner (...). Cependant, ces pilules me font dormir. Il n'y a rien que je n'aie essayé pour régler mon problème d'insomnie. La périménopause frappe fort, et l'insomnie est mon principal défi actuellement concernant cette nouvelle étape dans ma vie de femme. Si je ne travaillais pas, je ne prendrais pas de pilules pour dormir. Mais là, je n'ai strictement pas le choix, sinon, je ne pourrais tout simplement pas être fonctionnelle. 

Bref, tout ça ne règle rien, mais ça fait du bien de l'écrire.

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