Journal de Joyce Carol Oates

Je suis complètement fascinée par Joyce Carol Oates (suis en train de me taper son "Journal 1973-1982"). Elle est brillante, iconoclaste, originale, merveilleusement différente. Différente, et surprenante. C'est une artiste qui cherche sans cesse à exprimer des éclats d'humanité, et qui, sans chercher à faire l'intéressante, l'est constamment. Elle est éminemment prolifique. Elle a commencé à publier en 1963, et, à presque 80 ans, reste productive et encore publiée. Sa vie, c'est l'écriture. Romans, nouvelles, poésie, essais, critiques, son journal, et tous les autres écrits qui soutiennent son oeuvre. Et il y a aussi les oeuvres non publiées....Elle a enseigné jusqu'en 2014 à l'université de Princeton (New Jersey). Elle a été mariée deux fois (veuve de son mari adoré, Raymond Smith et remariée). Elle n'a pas eu d'enfants. Elle est forte et courageuse, malgré son air excessivement frêle d'oiseau perdu. A traversé vents et tempêtes. A été critiquée, salie, etc. A toujours gardé le cap sur l'essentiel, son Art. Hyper disciplinée, avec en tête le désir de ne jamais s'apitoyer, s'écraser, larmoyer, ou procrastiner. Toujours et encore le travail, mais jamais isolée des autres. Une vie ordinaire, mais une oeuvre profonde et dérangeante, souvent glauque et tordue. Elle ne cherche jamais la facilité, se questionne constamment. Aime être surprise, saisie et éblouie. Crois en l'homme. N'est jamais étonnée du pire et de la brutalité de ce monde. Non-conventionnelle, une intellectuelle qui joue et qui remue et qui saute dans le tas et fait tout péter. 

Ce que j'aime peut-être par-dessus tout la concernant, c'est son humilité. Pas une humilité mièvre, déconnectée, mais une authentique façon d'être qui s'oublie soi-même au profit de ce qui l'engage et la passionne. Ce qui ne l'empêche pas d'être coquette et bien mise, "son déguisement" dit-elle (parce qu'il faut bien se présenter aux autres d'une façon ou d'une autre).

Elle me donne beaucoup d'espoir, je ne sais pas l'exprimer autrement. Espoir que tout n'est pas vain, parce qu'elle ose croire que ce qu'elle fait et pense et sent a un sens et de la valeur, et qu'elle met terriblement d'énergie et de temps à ses réflexions et son travail; alors pourquoi moi aussi je ne croirais pas que, quelque part, ici ou ailleurs subsiste un sens, une réalité qui vaut la peine d'être pensée, réfléchie, explorée, découverte. Elle me donne le sentiment qu'en étant en quête, toujours en éveil, prête à vivre tout ce qui survient, sans se relâcher, il y aura des satisfactions liées à ce travail d'absorption et d'imprégnation, et quelque part c'est ça être un humain. C'est se donner les moyens d'être davantage humain, jour après jour.

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