mes errances intérieures ont pris fin
Samedi après-midi, 13h46, je me suis levée à 9h30, avec le sentiment d'avoir mal dormi (récurrent), et après un rêve étrange d'avion-fusée, et d'hélicoptère qui se jette sur la maison voisine de celle de mon enfance, et mon père est là, ma soeur aussi, mais dans une autre séquence du rêve, bref, rien à espérer côté interprétation, ne serait-ce qu'en étant moi, les rêves m'appartiennent en propre et font partie de mon paysage intérieur, comme plein d'autres choses qui ne serviront sans doute à rien, sauf à avoir été vécues, l'espace d'un instant.
On dirait que ça me fait rire, maintenant, toute cette question du sens, du sens de nos maladies, de nos morts, de nos actions et de la vie. Je crois davantage à la vie comme elle est, et comme elle peut être, en étant à l'écoute et curieuse, et disciplinée, et bien sûr, dans l'humilité et la gratitude, le fondement de tout (quand on peut se le permettre, bien sûr). Peut-on sérieusement être dans l'humilité et la gratitude lorsqu'on est un-e Roingyas désséché-e sur le bord d'une route, incapable de faire un pas de plus, qui va mourir dans l'anonymat le plus complet dans de grandes souffrances? (...)
Nous sommes à l'époque des errances. Errances de populations entières, sans sécurité, sans logis, sans travail, sans nourriture, sans terre. Complètement vulnérables, à la merci des autres. Avec des souffrances et des destinées si terribles, qu'il est épeurant de se mettre à leur place juste 10 secondes (...). Moi, je suis dans ma cuisine douillette, dans mon joli intérieur immaculé, avec des livres à lire, de la bouffe, tout le confort possible, dans un quartier propre (...) et calme, et la paix autour de moi et des millions d'opportunités possibles de rencontres, d'activités, de connaissances, de loisirs, de voyages, à chaque heure de chaque jour. Je suis une femme de quarante-huit ans qui, grâce à une alimentation abondante, saine et diversifiée, des soins corporels appropriés, un mode de vie sain, un travail régulier non épuisant et qui a un certain sens, des lectures, des apprentissages multiples et constants, des amis, une famille, des repères, une voix, la liberté, etc., peut espérer vivre en santé, très longtemps. Je me sens extrêmement privilégiée, et davantage chaque jour.
C'est fini les arrogances et les souffrances égocentriques de la vingtaine, les questionnements et les doutes sans fin sur le sens de mon existence et ma place en ce monde. C'est fini le grattage intempestif des blessures réelles ou ressenties comme telles, et l'apitoiement sur ma personne imparfaite dans un monde ingrat. Je suis une grande privilégiée. À quarante-huit ans (et treize ans de sobriété demain), mon souhait est de rester dans l'humilité et la gratitude, sans interruption, malgré tous les malgré, et rester curieuse, disciplinée, et mobilisée en vue de mettre ma vie au profit de mes accomplissements personnels nécessaires.
Être dans l'errance, figurativement, ça arrive à bien des gens de nos sociétés évoluées, éduquées, modernes, "efficaces". On dit que la souffrance ne se compare pas. C'est peut-être vrai, mais vraiment, est-ce si vrai? Peut-on comparer la souffrance infligée à soi-même, et celle infligée par les autres? Et que peut-on penser du taux de suicide élevé des sociétés modernes? Est-ce qu'on se tue autant ailleurs, et pour quelles raisons? Me concernant, mes errances intérieures ont pris fin. À moins que je ne sois dans l'illusion du bonheur, parce que je vis dans le confort et l'indifférence, et que je ne me laisser plus toucher, plus déranger, par rien, et surtout, par personne? (...)
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