problématique des meetings d'Alcooliques Anonymes durant mes heures de dîner au bureau
Si la vie n'est pas une expérience spirituelle, elle n'est rien. Le vide s'installe et prend toute la place. Le vide peut se montrer bruyant ou caché sous toutes sortes de pensées, d'objets ou autres distractions. On peut ne jamais s'apercevoir du vide. Mais le vide est agissant, dans sa capacité d'absorption et d'annihilation et de séparation d'avec la vie. Lorsqu'on a accès au vide, on le ressent sans rien autour, sec, vif et tranchant, ou bien insidieusement caché et agissant...et cela peut être le début de la fin de la chute ou un besoin de mouvement vers une puissance supérieure à soi... cependant la vie peut rester à moitié vécue ou mal vécue ou inexistante, ça dépend de plein de choses, du courage, entre autres, ou de la souffrance ressentie... Me concernant, j'ai accès à mon vide. Je le ressens. Mais j'essaie de l'ignorer, de faire comme s'il n'existait pas. Depuis des mois, j'essaie d'oublier qu'il existe et qu'il faut que je fasse quelque chose avec, qu'il fait partie de moi et qu'il est agissant à sa façon sournoise et que je dois faire attention. La seule et unique manière de rendre sa vie utile et féconde est de s'occuper de son vide, à mon avis. Je le fais de moins en moins. Pourquoi. Parce que je suis entrée dans le confort et l'indifférence, et que je n'arrive plus à en sortir. C'est comme si j'étais engluée là-dedans, et m'en extirper me demande un effort extraordinaire sans compensations faciles et rapides. Le vide est sournois. Il agit sans se montrer et fait son travail de sape insidieusement. Facile de faire comme s'il n'existait pas. Le chemin le moins fréquenté est celui de la reconnaissance du vide en premier lieu et de la prise en charge de sa destinée, i.e., de sa nature principalement spirituelle....dans une vie humaine.
Mon adjoint au bureau (celui qui a remplacé ma meilleure amie, partie sous d'autres lustres) ne sait pas que je fais du meeting d'Alcooliques Anonymes. Ce n'est pas trop pratique, parce que les midis lorsque je me rends à un meeting, je m'absente pour une longue heure, et c'est difficile de justifier cette absence-là sans même avoir dîné (alors que c'est le temps qui m'est alloué pour le faire). Ce qui fait que je pars en catimini sans dire où je vais, et lorsque je reviens je m'empresse de dîner rapidement, ce que je déteste faire. J'aime prendre mon temps pour m'alimenter, c'est une de mes manies. Le fait de ne pas pouvoir faire de meeting le midi en toute liberté, mais d'être furtive, cachée, pressée, m'enlève toute la spontanéité et la liberté de savourer le moment d'être dans une salle entourée de gens comme moi, qui prennent le temps d'être ensemble et de vivre un moment en général fort spirituellement. Je redoute que ça prenne trop de temps, qu'il se passe des choses au bureau durant mon absence, ou que mes dîners soient perçus trop longs et que mon adjoint, si on le lui demande, ne soit pas capable de "justifier" mes absences. La spiritualité est incompatible avec le stress et la vitesse. Je n'avais pas ce problème avec mon ancienne adjointe, elle était tout à fait au courant de mes sorties, et même elle m'accompagnait parfois, ce qui me faisait tellement plaisir. Souvent elle me disait: "D., tu devrais faire un meeting, me semble que ça fait longtemps que tu n'es pas allée, ça te ferait du bien". Son empathie et sa compréhension de ma condition me permettaient d'être davantage engagée spirituellement. Je n'avais pas à cacher cet aspect fondamental de ma vie et de ma personne, et cela était un grand bonheur. Tout ceci a disparu. C'est une des raisons pour lesquelles faire du meeting me parait davantage contraignant qu'avant. Et je ne suis pas prête à parler de mes choses intimes à mon adjoint. C'est trop tôt.
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