je juge (encore et toujours) les autres

Malgré des années de 12 Étapes d'Alcooliques Anonymes, je continue à juger les autres. Ce qui est fascinant, c'est qu'en faisant cela, immanquablement c'est le signe que je suis dure envers moi-même, que je manque d'indulgence envers moi-même, que je ne suis pas dans un esprit d'acceptation, que je serre les dents et que je force. Cela me ramène inévitablement à moi-même et mes propres failles. Lorsque je fais du meeting, et plus j'en fais et plus je le sens, il ne me vient pas à l'esprit, ou du moins cela se manifeste moins ostensiblement, de juger les autres. Cela s'explique facilement, ou du moins j'ai un début de réponse, et ce n'est pas de la théorie. Lorsque je fais du meeting, plusieurs fois par semaine par exemple, je suis en interaction régulière avec d'autres alcooliques, d'autres addicts, d'autres dépendants, tous différents, mais tous en quête de mieux-être (ou du moins avec l'objectif d'arrêter de consommer, ou de solidifier sa sobriété). Cette assiduité aux meetings me fait régulièrement sentir la souffrance, l'espoir des autres, et, bien sûr, la connexion avec Dieu. AA est un programme spirituel: Dieu, tel qu'on le conçoit. Cette reconnaissance de notre impuissance (face à notre maladie), et l'intégration d'un mode de vie spirituel ramène à l'humilité véritable. La question de la discipline de la gratitude est un autre concept réellement encouragé comme étant fondamental dans la poursuite d'une vie sans addiction active. Nous nous aidons les uns les autres, nous partageons les moments les moins glorieux de notre existence. Nous partageons nos défaites et nos espoirs. Nous sommes ensemble. Nous ne pouvons jamais nous sentir inutiles, ineptes, finis. La personne la plus éduquée, la plus matériellement gratifiée, partage ses défaites et ses espoirs avec un puant ou une puante à peine débarquée d'une série de cuites invraisemblables. Nous nous rappelons, ensemble, le degré fatal de la maladie, en aidant celui ou celle qui débarque, faible et pathétique. Nous sommes sur le même bateau, nous partageons la même maladie. Cette maladie qui ne fait pas de discrimination entre le pur de coeur et le dévoyé. Celui ou celle qui en arrache et celui ou celle qui s'en est sorti, un jour à la fois, tous ensemble, dans la même direction. Le programme est spirituel. Il amène l'alcoolique en rétablissement à se considérer comme une personne comme une autre, avec ses dons et ses capacités personnelles. Il n'y a pas de hiérarchie proprement dite dans AA. Tout le monde peut servir, dans l'idée d'aider celui ou celle qui souffre encore. Cela créé un sentiment fort d'appartenance à la race humaine, dans ses grandeurs et ses misères. Cela créé un sentiment fort d'humilité véritable.
Lorsque je ne fais pas assez de meetings (seulement un par semaine depuis quelques mois), mon ego reprend de la force. Le coeur aimant (l'âme) est moins sollicité. La gratitude s'estompe. J'ai moins d'indulgence envers les autres, la vie parait plus difficile, et....je juge les autres.

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